Le gouvernement recule sur le logiciel ardoise à usage discriminatoire
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Michèle Alliot-Marie a décidé, mardi 22 avril, de suspendre la phase de test du logiciel de police Ardoise jugé discriminatoire par des associations. "La ministre a décidé de suspendre la phase de test d'expérimentation en cours de ce logiciel", a annoncé son cabinet mardi. Elle "a entendu les craintes qui se sont manifestées", ajoute-t-il. La semaine dernière, le Collectif contre l'homophobie avait saisi la Haute Autorité de lutte contre les discriminations (Halde) et la Commission nationale de l'informatique et des libertés (CNIL), jugeant le logiciel litigieux. Dans un courrier adressé au ministère, la CNIL avait demandé plus de "précisions", concernant le nouveau système.
Le logiciel Ardoise, destiné à alimenter un futur fichier commun entre la police et la gendarmerie, devait mettre en évidence un certain nombre de données et de profils, classés par rubriques, et destinés, selon ses concepteurs, à "cerner" la victime ou le présumé auteur des faits. Ce sont ces rubriques retenues qui ont suscité un tollé : le policier est invité à cliquer par exemple sur "mineur en fugue", "sans domicile fixe", "personne âgée", "permanent syndical", "membre d'une secte", "transsexuel" ou "homosexuel".
BESOINS OPÉRATIONNELS
Amené à remplacer l'actuel logiciel de rédaction des procédures (LRP) datant de 1995, Ardoise était en phase de test dans la région lyonnaise, à Ecully.
La ministre de l'intérieur souhaite toutefois prendre en compte les besoins des services de police et de gendarmerie. Elle a entamé "une réflexion, avec l'expertise de la direction centrale de la police judiciaire, pour réétudier ces points et leur éventuelle pertinence réelle avec les besoins des enquêtes", explique-t-on Place Beauvau. Il doit s'agir de "corréler les besoins de la police et de la gendarmerie avec le respect des libertés individuelles", conclut la même source.
Le Collectif contre l'homophobie, basé à Montpellier, a jugé la décision de Mme Alliot-Marie "empreinte de sagesse et de raison". "C'est un premier pas, mais nous demandons maintenant à la ministre de mettre en place un groupe de travail" qui aurait pour mission "d'évaluer la compatibilité du logiciel avec le respect des libertés fondamentales", a par ailleurs déclaré à l'AFP Hussein Bourgi, président du Collectif. Un tel groupe de travail réunirait des représentants du ministère de l'intérieur et des syndicats de policiers, mais aussi des militants d'associations de défense des droits de l'homme.[/b]